Dans « Le duel des grands-mères » de Diadié Dembélé, Hamet, ado trop turbulent aux yeux de son entourage, est envoyé dans le village natal de son père loin de Bamako. Ce monde rural qui lui est quasi inconnu va lui apporter des clés sur son histoire et lui permettre de trouver enfin sa place.
Que raconte « le duel des grands-mères » ?
« Parce qu’il fait l’école buissonnière pour lire, manger des beignets et jouer aux billes, parce qu’il répond avec insolence, parce qu’il parle français mieux que les Français de France et qu’il commence à oublier sa langue maternelle, Hamet, un jeune garçon de Bamako, est envoyé loin de la capitale, dans le village où vivent ses deux grands-mères.
Ses parents espèrent que ces quelques mois lui apprendront l’obéissance, le respect des traditions, l’humilité.
Mais Hamet en rencontrant ses grands-mères, en buvant l’eau salée du puits, en travaillant aux champs, en se liant aux garçons du village, va découvrir bien davantage que l’obéissance : l’histoire des siens, les secrets de sa famille, de qui il est le fils et le petit-fils. C’est un retour à ses racines qui lui offre le monde, le fait grandir plus vite. »
Mon avis sur ce 1er roman de Diadié Dembélé
Palabres et commérages s’enchaînent joyeusement dans ce roman vous menant de Bamako au village de Yélimané au Mali. Hamet n’est pas un mauvais bougre : lui qui parle bambara, soninké et surtout un français digne d’un vieil académicien préfère flâner dans la rue plutôt que d’aller à l’école.
Une bêtise de trop, et le voilà envoyé dans le village natal de son père pour retrouver le droit chemin. Mais plus que l’obéissance, Hamet va découvrir son histoire familiale, ses racines, le respect des anciens et des coutumes. Mais son œil impertinent regarde avec un certain recul cette vie agricole et simple, les querelles de voisins, bien loin de sa vie à Bamako.
Ce roman au langage imagé avec des envolés poétiques est une immersion incroyable dans le quotidien de ce jeune garçon. Les tournures souvent alambiquées sont vraiment-vraiment savoureuses (le doublement de mot est volontaire et vous y verrez un clin d’oeil au roman quand vous l’aurez débuté !).
Vrai moulin à paroles, Hamet commente tout ce qu’il vit avec un franc-parler drôle et déconcertant pour ses interlocuteurs. Ne pas avoir la langue dans sa poche va lui jouer des tours… mais ce n est rien à côté de l’amour prodigué par les deux grands mères, chacune à sa façon.
Cette parenthèse dans la vie de Hamet lui donne l’opportunité de mieux comprendre d’où il vient, les sacrifices de chacun et pourquoi on attend tant de lui.
Ce roman est musical. Il donne envie d’être lu à voix haute tant les propos sont chantants tout droit sortis de l’esprit d’un très bon conteur. On est assurément au spectacle avec Hamet ! Mais derrière sa candeur ou sa nonchalance, beaucoup de non-dits vont émerger sur son histoire familiale. Il est question de polygamie, de respect des traditions, de religion, d’exil, de jalousie, de la place de la langue française….
Un seul regret : aucune note de bas de page pour rendre accessibles à tous les expressions en bambara, arabe ou soninké, lancées au détour d’anecdotes. Cela aurait été un beau cadeau nous permettant de rentrer encore plus dans ce monde multilingue décrit par l’auteur.
Une lecture qui donne envie de se mettre à l’ombre du fromager centenaire pour profiter de la vie de ce village malien sous le regard de Mama Cissé et Mama Hata.
Le roman de Diadié Dembélé a reçu le Prix littéraire des lycéens 2022/2023 pour les Hauts-de-Seine.
Avec ce roman, j’ai passé quelques heures au Mali aux côtés d’Hamet et son impertinence va me manquer !
Sandrine Damie
Le duel des grands-mères
De Diadié Dembélé
Format Broché : éditions Lattès 19 euros
Format Poche : J’ai Lu 7,80 euros
