Avec « La mélancolie de l’ours polaire », Mo Malø signe un récit de chasse à l’ours, humble et respectueux des hommes et des animaux qui vont lui offrir un cadeau inestimable : en faire l’un des leurs durant trois semaines…
Sans vouloir l’offenser, Mo Malø n’a pas le profil d’un aventurier. Dès les premières lignes de son récit, on comprend qu’il est comme vous et moi, pas forcément bien préparé pour l’aventure qui l’attend mais volontaire ! En se livrant avec lucidité et humour, Mo Malø met à la portée de tous ce monde inuit, diamétralement opposé à ce que nous vivons en Occident.
Que raconte « La mélancolie de l’ours polaire »
Présentation des éditions Paulsen :
« Groenland, 74e parallèle Nord, 450 habitants coupés du reste du monde par la banquise hivernale, dont une poignée de chasseurs d’ours polaires. A priori, pas le genre de personnes à ouvrir facilement leur porte. Et pourtant… À raison de virées de près de douze heures d’affilée à traîneaux par -30°C, en immersion totale, Mo Malø a suivi la traque de l’animal emblématique sur ces immensités septentrionales et vécu une aventure humaine auprès des Groenlandais qui l’ont initié à cette pratique. Il a tenté de mieux comprendre la perpétuation de cette tradition ancestrale dans un monde en mutation accélérée, où l’ours symbolise plus que jamais le dérèglement climatique et notre conscience écologique. Le récit de ce cache-cache entre le nanook et les humains permet de toucher du doigt la mélancolie de cet « éternel errant », spolié de ses terres, et de montrer à quel point leurs destins sont liés. »
Mon avis sur ce roman sur la chasse à l’ours au Groenland
La passion de Mo Malø pour le Groenland est tout sauf soudaine. Pour preuve, sa série de polars où son enquêteur fétiche, Qaanaaq Adriensen, va quitter Copenhague pour épauler la police locale sur ses terres natales d’Arctique. Dans « La mélancolie de l’ours polaire », il dévoile aussi ce joli cadeau inuit de sa marraine qui déjà le faisait rêver de la banquise dès son plus jeune âge.
Aujourdhui, il aborde la banquise les yeux dans les yeux : il témoigne de son séjour auprès de chasseurs d’ours sans distiller cette expérience hors-normes dans une fiction. Et s’il n’ a pas le profil d’un explorateur, il fait preuve d’un sens de l’écoute, d’empathie et de ténacité précieux.
Son récit de vie fait des parallèles avec notre vie en Occident et nous invite à réfléchir à notre lien avec les autres, les animaux, les traditions. Tour à tour, il évoque la chasse vivrière, la place accordée aux chiens dans la vie des chasseurs, la transmission des gestes ancestraux qui s’érode, les relations humains, l’équilibre entre les humains et les animaux chassés, etc. Qui sommes-nous pour juger et règlementer la vie des Inuits, ce peuple vivant encore en osmose avec la nature aussi hostile soit-elle ? Le chapitre « ce que nous risquons de perdre » est certainement l’un des passages forts de ce récit.
Et je terminerai par cet extrait :
« Peu à peu, je comprends les termes du contrat implicite passé entre cet environnement et les Inuits qui le peuplent : ils doivent mutuellement s’accepter. Ne pas demander à l’autre plus que ce qu’il ne peut donner. Ne pas former de projets fous pour le lendemain ; juste creuser autant que possible le modeste sillon du jour présent ».
Merci à Mo Malø de nous avoir fait croiser la route d’Ole, Mathias, Paulus et leurs chiens.
Et comme il cite de nombreux philosophes, anthropologues, écrivains au fil de ses mémoires polaires, je vais essayer de trouver dans ma médiathèque préférée quelques-uns des ouvrages donnés en référence.
Ai-je besoin de vous dire que ce récit est plus qu’un coup de coeur ? C’est une révélation !
Sandrine Damie
La mélancolie de l’ours polaire
De Mo Malø
Éditions Paulsen
21 € (papier) – 12,99 € (numérique)
Lauréat Prix Pierre Loti 2024
