S’inspirant de la mort de George Floyd aux USA, le roman « Milwaukee Blues » met en lumière les injustices systémiques qui pèsent sur les Afro-Américains, en montrant comment la société peut broyer les espoirs d’un individu malgré son talent et sa bonne volonté.
Un gérant pakistanais d’une supérette compose le numéro d’urgence 911 pour signaler un billet de banque suspect. Cette décision fatidique entraîne l’intervention de la police et conduit à la mort d’Emmett, un homme noir étouffé sous le genou d’un policier, un écho clair à la tragédie de George Floyd. C’est le moment où tout bascule dans ce roman de Louis-Philippe Dalembert, auteur haïtien.
Mon avis sur la lecture du roman Milwaukee blues
Dans Milwaukee Blues, tout tourne autour d’Emmett, ce jeune afro-etasunien d’une banlieue pauvre de Milwaukee. S’il est promis à un avenir meilleur que celui de ses ancêtres grâce à ses talents de footballeur américain, c’était sans compter sur le déterminisme social, la faute à pas de chance… et surtout à ce policier qui l’immobilise à terre, sans ménagement, jusqu’à le tuer. Banal fait divers qui fait la Une des actualités, comme tant d’autres avant lui.
Mais voilà, en donnant la voix à tous ceux qui l’ont aimé, côtoyé ou malmené, l’auteur fait du destin de cet homme ordinaire un exemple universel. Emmett, ce pourrait être vous (surtout si vous êtes pauvre, noir et vivez dans un quartier défavorisé aux États-Unis).
Nourrie par le meurtre de George Floyd en mai 2020 mais aussi de nombreux autres « faits divers » où la police tue une personne noire (que je n’aime pas cette expression, si vous en avez une plus respectueuse, dites-moi !), l’histoire de Milwaukee Blues est ainsi profondément ordinaire. L’auteur dresse un portrait sociologique fin de l’Amérique à travers le parcours de vie d’Emmett.
Dans chaque chapitre, Louis-Philippe Dalembert donne la parole à l’un des proches de la victime. C’est touchant et c’est aussi l’occasion de voir son histoire sous des prismes différents. Le plus dur à lire est certainement celui du policier qui l’a tué, au discours infâme.
Et puis, on arrive sur les chapitres de préparation de l’enterrement et de la marche en son hommage. Le prêche de Ma Robinson est un véritable plaidoyer d’humanité avant le chaos final.
- Tirer le fil des souvenirs de chacun.
- Donner la parole à ceux que l’on n’écoute jamais.
- Prôner la tolérance et la solidarité alors que tout le système en place fait perdurer le communautarisme.
Cette approche aux multiples facettes donne une image nuancée et riche de l’homme qui vient d’être tué. Au-delà des reportages en boucle qui caricaturent, déforment voire mentent délibérément sur l’homme assassiné par un policier, Louis-Philippe Dalembert fait preuve de sang-froid, de réflexion, d’un travail de sociologue. Il donne à voir la complexité de chaque vie et surtout, il malmène le rêve américain, avec des piques ou des pointes d’humour noir bienvenus.
Alors que Trump vient de (re)prendre le pouvoir aux USA, je vous recommande cet ouvrage.
Après cette lecture, j’ai le blues.
Sandrine Damie
Milwaukee Blues
De Louis-Philippe Dalembert
Éditions Sabine Wespieser
21 €, également disponible au format epub et pdf au prix de 15,99 €
Cette lecture s’inscrit ans le challenge « The american break« et, avec ce livre, je coche ainsi le Wisconsin, comme destination.
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