Route One de Michel Moutot n’est pas qu’un roman. C’est une tranche de vie des Etats-Unis, celle qui signe la fin d’un monde et dévoile les prémices de la société moderne, des prouesses technologiques et de l’arrivée du tourisme. Michel Moutot nous offre une incroyable épopée à la sauce américaine. Rêve américain, crise des années 30, pègre… il dépeint les USA de la fin du 19e siècle à 1936 comme si on y était !
Route One : c’est là que tout commence ?
De la nature à l’asphalte, de l’état sauvage au rêve américain… On pourrait ainsi résumer le roman Route One. Il rend hommage à cet incroyable chantier qui a vu naître la route reliant la Californie du Sud au Canada. Au-delà de cet exploit technique, c’est un bout de l’histoire de l’Amérique qui défile sous nos yeux. L’arrivée d’engins de chantier, l’exploitation des mines d’or, la main d’œuvre qui rêve d’une vie meilleure et qui migre vers ces terres à défricher, la mafia qui s’immisce partout avec Al Capone à sa tête, les espoirs et les désillusions…
Le récit alterne deux parcours de vie, sur deux périodes différentes :
- celui de la famille Rock, dont Moses le grand-père mormon polygame s’est installé dans la montagne pour y trouver le calme et vivre loin de la société en faisant du commerce (et aussi quelques arrangements non officiels sur un filon d’or qu’il a trouvé !). Propriétaire d’un ranch à Big Sur, son fils Hyram a repris le flambeau et souhaite aussi rester « hors du monde » avec ses femmes et ses enfants. Il combat farouchement le projet de route qui doit défigurer son pan de montagne… et amener la civilisation au cœur de son domaine forestier, avec vue sur l’océan Pacifique.
- et celle de la famille Tremblay avec notamment Wilbur Tremblay, enfant adopté qui deviendra l’ingénieur en charge d’une partie de la construction de cette route. Fasciné par les ponts et ouvrages de génie civil, il voue sa vie à l’expansion des voies de circulation. Et si ce personnage est ambitieux, il incarne aussi la bonté, dans le monde brutal où il évolue en électron libre.
Mon avis sur le roman « Route One »
Se pencher sur les grandes constructions qui façonnent les Etats-Unis n’est pas un nouveau terrain de jeu pour l’auteur. Ce roman s’inscrit dans les pas de ses précédents ouvrages, mettant en lumière l’impact de ces changements urbains dans la société américaine.
Révélatrice d’une époque, la construction de la Route One dépeint remarquablement l’atmosphère et l’effervescence du début du 20e siècle aux Etats-Unis, avec ses espoirs, ses excès, les résistances au changement, la préservation d’une beauté sauvage, le progrès à tout prix.
Sillonner la route avec Michel Moutot, c’est remonter le temps et revivre aux côtés de ceux qui ont façonné ou subi « le Nouveau Monde », avec les différents points de vue qui s’entremêlent. Une fresque qui donne envie de boucler sa valise et de chevaucher une Indian pour faire corps avec la route et avec la nature qui lui sert de cocon.
Ce roman de plus de 300 pages alterne les périodes de construction, avec des aller-retour dans l’avancée des travaux qui invitent à bien saisir les changements, le ressenti de chacun, les enjeux.
Embrassant les contours des falaises, la route se faufile aujourd’hui au bord de l’Océan Pacifique sans que l’on mesure les efforts et la technologie nécessaires pour amadouer la nature, la rendre docile au point que le macadam s’impose comme s’il avait toujours eu sa place dans ce décor de carte postale. Pourtant que de morts et de déceptions, ont ponctué sa construction. Entre désillusion et rêve d’un ailleurs meilleur, bienvenue en Amérique !
Et si vous programmez d’emprunter cette mythique route américaine, surnommée depuis la « California Dream Road », ayez une pensée pour les pionniers et les hommes qui y ont laissé leur vie. Ce roman m’a donné envie de dénicher quelques vidéos pour voir la beauté des lieux si bien décrits par l’auteur. Je partage avec vous cette pépite :
Séduite par le style de Michel Moutot, j’ai ajouté à ma PAL ses précédents livres ! Je vous invite à l’écouter parler de son itinéraire, de journaliste à écrivain dans cet échange :
Présentation par sa maison d’édition
« À l’aube du XXe siècle, des hommes intrépides bâtissent la mythique route One, balcon sur l’océan Pacifique qui longe la côte ouest des États-Unis, de la Californie du Sud aux confins du Canada. Mais le destin du jeune ingénieur chargé de tracer la voie sur ces terres sauvages va croiser celui du dernier grand propriétaire terrien de Big Sur, mormon polygame à la fortune mystérieuse, prêt à empêcher toute intrusion dans son domaine et préserver ses secrets. La construction de la route One, c’est aussi la parabole de la fin d’un monde, poussé dans les oubliettes de l’Histoire par un autre. Le XXe siècle et ses machines rugissantes remplacent le XIXe siècle, la pelle mécanique chasse le grizzly. À l’autre bout de l’Amérique, la dernière route part à l’assaut des falaises du Pacifique et met le point final à la conquête de l’Ouest. »
J’ai adoré sillonner cette Route One !
Comptez sur moi pour pour parler des autres romans de Michel Moutot prochainement 🙂
Sandrine Damie
Route One
De Michel Moutot
Seuil
20 euros
Merci, Sandrine !
Merci à vous pour cette épopée qui m’a donné envie aussi bien d’aller aux Etats-Unis que d’en savoir plus sur la construction des routes et édifices majeurs des grandes villes. J’aime qu’on me raconte la petite histoire de la Grande Histoire. Au plaisir de chroniquer vos précédents romans… et ceux à venir ! Je garde un œil attentif sur vos prochaines sorties. Une question si vous me faites le plaisir de repasser sur le blog : votre roman a tout pour faire un bon film ! Aucune production ne vous a sollicité pour l’adapter ? Bien à vous, Sandrine
Pas encore… mais c’est une remarque qu’on me fait souvent. Mon 2e roman, Séquoias, a remporter le prix du livre susceptible d’être adapté au cinéma (ne l’a pas été)….
Cordialement
Michel