A quelques jours de la sortie de son nouvel album « combien faut-il de terre à un homme »(chez Thierry Magnier), Annelise Heurtier évoque son parcours, son métier d’auteur et ses livres.
Vous êtes auteure jeunesse depuis 2008. Pourquoi avez-vous choisi cette orientation vers l’écriture après une école de commerce ?
Je n’ai pas vraiment choisi…en tous cas il ne s’agissait pas d’une orientation planifiée, réfléchie, à l’inverse des études que j’ai poursuivies. J’ai l’impression que c’est arrivé au fil des hasards de la vie. En même temps, comme il est indéniable que j’ai toujours aimé les mots, je me dis que même si j’avais emprunté un autre chemin (personnel et professionnel) l’envie d’écrire aurait tout de même fini par surgir. Cela fait tellement partie de mon quotidien à présent, que je n’imagine pas ma vie autrement !
Vous souvenez-vous du premier thème qui vous a inspiré ?
Non, pas vraiment…Avant d’avoir l’idée de me mettre à écrire, beaucoup de thèmes stimulaient mon imagination sans que je pense à en faire quelque chose de concret en les couchant sur le papier.
… et de votre première journée d’écriture ?
Oui, parce que ma première journée d’auteur en tant que tel est assez récente, elle date d’il y a un peu plus de 3 ans, quand nous sommes arrivés à Tahiti et que j’ai pris la décision de ne pas rechercher d’emploi. A l’époque, ma fille n’avait que quelques mois, cette première journée a donc été très morcelée 😉 … C’est beaucoup plus simple maintenant que mes deux enfants sont à l’école.
Comment avez-vous démarché la 1re maison d’édition qui vous a fait confiance ?
Très simplement, comme tous les auteurs j’imagine (si il y a une autre méthode, je veux bien la connaitre). J’ai imprimé mon texte, ai rédigé une lettre d’accompagnement et suis allée à la Poste avec mes enveloppes kraft et mes pensées pleines de petites bulles d’espoir !
Après quelques années d’expérience, comment s’organise une journée de travail pour vous ?
Mes journées sont assez courtes, malheureusement. Je travaille de 8 h à 12 h environ (le reste de la journée étant consacré à mes enfants, à la maison et à mes activités extra-« professionnelles », sportives principalement – j’en ai besoin). Selon le cas, je peux effectuer des recherches pour un roman, réaliser des corrections, répondre à des lecteurs ou à des interviews comme aujourd’hui…Au final, l’écriture en elle-même n’est pas du tout systématique. D’autant qu’après avoir terminé un « gros » roman, j’ai souvent besoin de m’aérer l’esprit pendant quelques temps. Donc parfois, je ne fais rien….ce qui ne veut pas dire que c’est du temps perdu ! Beaucoup d’idées surviennent lorsque je ne les cherche pas, par exemple quand je lis la presse, quand j’écoute des émissions de radio, mes enfants….et aussi très souvent lorsque je vais courir !
Vos albums et romans sont souvent l’occasion de découvrir une destination : Les Etats-Unis dans les années 50 dans « Sweet sixteen« , la Mongolie dans « Là où naissent les nuages » ou encore le Népal dans « Carnet rouge ». Votre écriture est tellement fluide, détaillée, enthousiaste qu’on a l’impression que vous devez vivre vos histoires quand vous les écrivez ! Quel est votre secret pour nous plonger si justement dans des univers aussi différents ?
Merci ! Je ne sais pas trop comment répondre à cette question parce que tout cela se fait naturellement – j’espère que je n’ai pas l’air présomptueuse – ce que je veux dire, c’est que je n’ai pas de technique particulière. J’écris au coup de coeur, sur des sujets qui m’intéressent…J’ouvre mon ordinateur et je laisse sortir les mots.
Après, il est vrai que ce type de roman nécessite beaucoup de recherches au préalable. Mais cela ne me dérange pas du tout, au contraire, j’adore apprendre de nouvelles choses sur des destinations que je ne connais pas !
Quelle place accordez-vous à des souvenirs de vos propres voyages dans l’écriture ?
Pas beaucoup ! Aucune, même ! Je ne suis allée dans aucun des endroits sur lesquels j’ai écrit (Etats-Unis mis à part, mais n’imaginez pas que c’était dans les années 60…).
Votre prochain album « combien faut-il de terre à un homme » est adapté d’une nouvelle de Tolstoï. Pouvez-vous nous parler de votre démarche d’écriture et la collaboration avec l’illustrateur pour donner une nouvelle vie à cette nouvelle ?
J’ai lu un recueil de nouvelles de Tolstoï et cette histoire, qui, il me semble, ouvrait l’ouvrage, m’a énormément plu. Je l’ai tout de suite imaginée en album ….je me suis donc mise au travail et une fois le texte rédigé, je l’ai envoyé à une petite poignée d’éditeurs. Les éditions Thierry Magnier m’ont fait confiance, et ce sont eux qui ont proposé le texte à Raphael Urviller. Je suis absolument ravie et honorée de cette collaboration, je trouve les illustrations sublimes et l’objet-livre magnifique.
Vos albums et romans remportent un vif succès avec de nombreux prix et sélections. Comment gérez-vous cette notoriété grandissante ?
Ha ha ha ! Très facilement, personne ne fait le pied de grue devant mon portail pour m’arracher un autographe J
Vous vivez en Polynésie française. A quand un album ou un roman Jeunesse où se mêleraient fiction et traditions ancestrales ?
Ecrire sur Tahiti, pourquoi pas, mais sur les traditions ancestrales en particulier, pas vraiment….Je ne crois pas que je me sentirais vraiment légitime. J’aurais l’impression de m’attaquer à un domaine qui me dépasse totalement (sans compter qu’il n’existe pas beaucoup de documents écrits sur les traditions anciennes) et de plus, j’aurais peur des réactions sur place.
Par contre, un album sur le Ori Tahiti (la danse tahitienne), un pilier de la culture polynésienne paraitra au printemps 2015. Pratiquant cette danse depuis 3 ans, je me sens un peu plus en confiance pour m’approprier la thématique !
Propos recueillis par Sandrine Damie